Citation :

❝ Dans leurs derniers moments la plupart des gens révèlent qui ils sont réellement.
Certains instants vous marquent à jamais. Il y a ces jours qui disparaissent totalement de votre mémoire, ils s’éclipsent, et seulement quelques moments particuliers reviennent au premier plan dans les instants de nostalgie, ou encore ces nuits cauchemardesques où l'on se réveille en sueur, ne sachant plus pendant quelques secondes si on est là bas, ou ici. ' Tu vois cette lumière là bas ? ' Du haut de mes neuf ans je ne connaissais pas grand chose du monde qui m'entourait, je me souviens que j'étais sujet à des colères, si bien que ma mère ne me laissait guère sortir, si ce n'est pour me rendre chez les Davis, nos voisins qui depuis toujours m'accueillaient comme si j'étais un membre à part entière de la famille. ' Ce n'est pas une lumière, c'est une étoile. ' J'étais déjà rêveur à cet âge, pensant pouvoir m'éloigner, fuir loin de la vie simple et détestable que je vivais. ' Ça je le sais bien... mais tu sais ce que c'est une étoile ? ' Rien de plus qu'une masse morte dans l'univers, je ne pouvais pourtant lui dire cela, l'innocence, la beauté d'âme de mon amie m'en empêchant toujours. ' Maman m'a dit un jour que les étoiles sont des anges qui veillent sur nous pendant la nuit. Tu crois que c'est vrai ? ' Aucunement, personne ne veille sur nous, voilà ce que j'aurais du répondre. ' Tu y crois alors moi aussi. '

' Austin... Où est ce que tu es ? ' Depuis des années, je passais quasiment chaque petit instant de mon existence à garder un œil sur elle, comme un ange dans le ciel pendant son sommeil, je veillais, m'assurant que rien ni personne ne lui ferait jamais de mal. Je faisais parti de ces enfants toujours à part, en marge, toujours en colère. ' Arrête c'est pas drôle, je flippe ! ' Comme tous les ans, elle affectionnait fêter halloween, m'assurant que cette fête était la parfaite occasion pour être qui elle voulait être, et que moi aussi je pouvais devenir qui je souhaitais durant cette unique journée. Il était déjà plus de vingt deux heures et elle avançait prudemment à travers le cimetière qu'elle avait choisi elle même pour notre rencontre. ' Je te jure que si tu te montre pas je rentre, et je t'adressais plus jamais la... ' Elle s'arrêta lorsqu'elle me vit, assis plus loin sur une sépulture, tenant entre mes mains un sac en plastique sombre. Je la vis lever les yeux au ciel, et presser le pas pour arriver jusqu'à moi. ' Quand même ! C'est pas du tout drôle tu sais... qu'est ce que c'est que ça ? ' Le silence régnant ici n'était brisé que par le son de sa voix, claire et pourtant comme feutrée par le lieu lui même. ' Un cadeau. ' Je serrais le sac dans ma main comme par peur de le perdre, ou bien qu'il m'échappe. ' Pour moi ? Mais ce n'est pas mon anniversaire... ' Elle fronçait les sourcils, si bien qu'une petite ride apparut entre ses yeux, ce qui me faisait toujours sourire. ' Non, ce n'est pas pour toi, c'est pour moi. ' Elle parut surprise, et aussi assez déçue... mais elle le masqua assez rapidement, une chose qu'elle avait apprise à mon contact. ' Tu te fais des cadeaux maintenant ?! ' Elle vint s'assoir à côté de moi, ignorant totalement le fait que nous étions installé au dessus d'un corps inconnu... ' Cela vient de mon géniteur. Ma mère me la remit ce matin. ' Et depuis je ne l'avais pas lâché, une partie de moi voulait détruire ce qu'il contenait, mais une autre brulait de savoir de quoi il s'agissait. La haine m'habitant fut ébranlée par une envie presque sanguine de reconnaissance de la part de mon géniteur. ' Ouvre le. ' Je secouais la tête pour toute réponse. ' Alors donne, je vais l'ouvrir. ' Je réagis vivement, m'échappant en la bousculant légèrement. ' Bon j'ai compris... débouille toi ! ' Elle avait déjà tourné les talons, traversant à pas vifs les allées de tombes alignées tristement. Elle ne remarqua pas tout de suite que je la suivais de prêt. ' Qu'est ce que tu veux bordel ?! ' Sa colère était compréhensible, elle était comme une sœur, la seule à comprendre celui que j'étais alors, et pourtant, à certains instants, elle devait me penser fou. Je lui tendis le sac, baissant les yeux sur ses mains qui s'en emparaient.

❝ Quand vous croyez que vous aimez une personne plus qu’elle ne vous aime, ça peut vous rendre dingue.
Je ne saurais dire exactement comment tout cela a commencé. Je me souviens avoir commencé l'université sans trop savoir où cela allait me mener. La rentrée s'était plutôt bien passé et j'avais pris Arts Dramatiques simplement pour rester proche de l'univers qui me passionnait depuis toujours, la musique. ' Tu es Austin Campbell ? ' J'étais debout à la fenêtre d'une chambre étudiante des plus banales, ternes et je m'imaginais déjà redécorer les lieux. Seulement une chose m'interpella à peine arrivé, de ma fenêtre j'avais une vue prenante sur la grande pelouse du campus, mais je ne pouvais voir Juliet, je n'avais pas vu sur sa fenêtre, comment allais-je commencer mes journées désormais ? Je détestais cette idée de voir tout changer si bêtement. Je n'ai jamais aimé le changement, l'inconnu. Je me retournais en entendant cette voix, mon nouveau colocataire. Un parfait étranger. ' Oui. Tu dois être... ' Je jetais un bref coup d’œil sur la petite feuille qu'on m'avait remis à l'accueil. ' Elijah Hastings. Ravi de te rencontrer. Avant toute chose, on va mettre quelques petites choses au point, je ne veux rien de bizarre dans cette chambre, alors si tu as un culte sataniste particulier, merci de ne pas le partager, et de même je ne suis pas quelqu'un d'étrange, donc j'aime la tranquillité. Tu as déjà choisi le côté de la fenêtre à ce que je vois, très bien ce sera donc mon espace... ' Il termina sa tirade en déposant son sac sur le lit côté de la porte, et je vis qu'il avait encore deux valises derrière lui. Je n'avais jamais rencontré quelqu'un d'aussi bavard, il en était même presque agaçant. C'est ce que j'ai pensé au début du moins...

' De quoi as-tu peur au juste ?! ' J'étais dos au mur, littéralement. Cela faisait plusieurs mois que tout s'embrouillait dans mon esprit. Durant mes années lycée, je ne m'étais jamais intéressé aux histoires de cœurs, encore moins aux filles. Durant toutes ces années je ne m'étais jamais vraiment posé de questions sur le pourquoi du comment, jusqu'à Elijah. Sans doute parce que tout en lui était à l'inverse de celui que je suis. Il était extravertie, bavard, drôle et intelligent, il avait cette capacité de tout tourner à la dérision, de remettre ses choix en questions, de paniquer dès que quelqu'un avait le malheur de porter du vert, absolument pas la teinte de cet hiver à l'entendre... des bêtises comme celles ci qui avec le temps c'étaient mises à me faire rire. J'étais doucement tomber sous le charme et le fait qu'il soit un homme ne m'avait gêné en rien, sans doute parce qu'au fond de moi, je le savais depuis toujours. ' Je n'ai pas peur. ' J'étais terrifié plutôt. Je n'avais jamais envisagé une relation avec un homme même si je me savais gay depuis un moment déjà. Je n'étais pas certains d'être prêt pour ça, sans doute parce que ce que je ressentais alors pour lui me crever le cœur, et ne serait-ce qu'imaginer qu'il puisse me le briser étouffait toutes mes envies. ' Tu as peur, je le vois, même si je sais pas exactement de quoi... ' De rien, de tout, de lui surtout. ' Je n'ai jamais été... je ne suis pas certain d'être ce que tu crois. ' Il se mit à rire, un rire si franc que j'en fus presque vexé. ' Tu es autant gay que moi ça je peux te l'assurer, seulement tu le camoufle tellement bien et depuis tellement de temps que t'as réussi à te convaincre que tu ne l'étais peut être pas ! ' Il cessa de rire, scrutant mes réactions, conscient que je n'étais qu'un mystère à percer. ' J'ai eu les mêmes doutes, bien que j'ai su très vite qui j'étais. Si tu n'es pas prêt à en parler, ce n'est pas grave, ça ne t'empêche pas de vivre quelque chose de beau. ' Il n'avait pas tord. Ce soir là je me rendis compte que je l'aimais, beaucoup plus qu'il ne pourrait jamais le comprendre, qu'il ne pourrait m'aimer lui même.

❝ J’aurais jamais cru qu’on pouvait se faire du mal en s’aimant trop. Mais peut être que si.
' Je suppose que je dois juste m'y faire, tu vas devenir célèbre, voyager à travers le monde et tu m'oublieras. Il y a quelques années j'aurais sans doute exploser de colère rien qu'en me rendant compte de ça, mais aujourd'hui je suis tellement fier de toi que tout ce que je peux faire c'est espérer que tu reviendras. ' Je me rendais compte que j'étais devenu le plus romantique de nous deux, j'étais depuis toujours le plus aimant c'était certain, le plus démonstratif aussi, mais la palme du plus romantique lui revenait toujours. Je n'arrivais pas à croire que nous y étions, il allait s'envoler pour la France afin de commencer le tournage d'un film et moi je restais ici, bossant pour une grande firme, j'adorais mon job certes mais l'idée de le laisser partir, peut être pour toujours, m'angoissait. ' Je t'aime, je reviendrais le plus vite possible, le plus souvent aussi. Toi tu n'as pas intérêt à m'oublier par contre ! ' Son sourire eut raison de mes doutes. Son vol allait l'emmener si loin de moi que je doutais chaque seconde de le supporter. Je détestais l'idée de ne pas le voir chaque jour, de ne pas savoir ce qu'il allait faire, avec qui. Je me devais pourtant de me raisonner, n'est ce pas cela aimer ? Se sacrifier, sacrifier ses sentiments pour que l'autre soit heureux ? Sans doute. Même si cela faisait l'effet d'une lame enfoncée en plein cœur.

Sept mois, cela faisait maintenant sept mois que j'étais installé dans ce petit appartement, sept mois que je travaillais à l'agence, sept mois que j'étais célibataire également. Je n'aurais sans doute pas du y croire au début, j'aurais sans doute du rompre avant même son départ. Pourtant je l'aimais, encore aujourd'hui, j'essayais de me convaincre qu'il reviendrait, mais il ne l'avait jamais fait. Malgré ses promesses, malgré ces brefs instants où j'avais pu lui parler et où il avait juré... J'avais pourtant réussi à surmonter tout cela. Son absence, mon amour pour lui que je tentais d'effacer. Heureusement je n'étais plus seul. ' Un double café noir, sans sucre et sans crème. ' Je souris en entendant la voix de Juliet, celle ci s'installant en face de moi avec sa propre version d'un café, avec tout dedans à part du café. ' Comment est ce que tu peux boire ça.. tu sais que si tu en bois un tous les jours pendant les deux prochains mois tu ne rentreras plus dans ton jeans ! ' Elle grimaça, avalant une gorgée du breuvage fumant. ' Ne t'occupe pas de mes fesses, discutons plutôt du mec que j'ai aperçu dans ton bureau hier... Amant ? ' Je secouais vivement la tête, me mettant à rire. ' Surement pas, il n'est pas du tout mon genre. ' Elle resta un moment à me fixer, avant de sourire elle aussi. ' C'est dommage, il était mignon, et il a l'air de complètement perdre ses moyens quand tu es là. ' Cela la fit rire, ce mec en question était un nouveau stagiaire, maladroit comme pas possible, et surtout c'est vrai assez mignon. ' Ne dis pas de bêtises, de toute façon ça ne m’intéresse pas, je veux seulement me concentrer sur mon travail. ' Juliet m'avait brisé le cœur à sa manière, en quittant la ville mais au contraire d'autres elle était revenue vers moi. ' Tu dis ça à cause d'Elijah, mais je crois... il est temps que tu te reprenne en main ! ' Elle n'avait sans doute pas tord, mais tout comme je me savais incapable de plonger dans une nouvelle histoire, je voyais sur ses yeux fatigués qu'elle n'était pas en paix elle non plus...