▬ Je

Je n’avais aucune idée d’où j’allais. Encore moins de qui j’étais. Tout a toujours été facile pour moi. La famille, les amis, les études, le sport, les filles. Un père avocat, une mère directrice marketing, une sœur aînée, un frère cadet, schéma basique de la famille américaine. Nous vivions à Denver depuis toujours, je n’avais connu que ça, ne pensais pas avoir à élargir mes horizons. Joueur dans l’équipe de hockey, les cours n’étaient pas vraiment compliqués pour moi, mais je m’évertuais à faire le strict minimum histoire qu’on me fiche la paix. Je donnais à tout le monde ce qu’ils voulaient, dans la joie et la bonne humeur. Mes parents ne pouvaient rien me dire, n’en avaient pas envie, je vivais tranquille. Jusqu’à cette nuit-là. Je n’ai pas vraiment fait attention, vous savez. Je n’aurais jamais dû le laisser conduire, lui que je connaissais à peine, mais j’étais bien trop occupé à peloter cette blonde sur la banquette arrière pour me soucier du reste. C’était toujours comme ça, de toute façon. Je n’avais même pas bu, ce soir-là, une bière tout au plus, mais les tests du championnat se faisait le lendemain, et je savais pertinemment que de mauvais résultat m’empêcheraient de finir la saison. Et j’ai pas fait attention. Je me demande même s’il a freiné. Avec le recul, je ne me souviens pas du crissement des pneus. Je me rappelle les cris, distinctement. Et ces éclats de verre. Il avait foncé dans un arbre, et je n’avais rien. La fille devant avait sa ceinture, pur automatisme, le fait de n’être pas vraiment assis nous avait sauvé, la blonde et moi. Le conducteur était passé à travers le par brise. « Vous avez vraiment été cons cette nuit-là… » Je ne savais pas d’où elle sortait, ni même qui elle était. Une semaine était passée depuis l’enterrement, et j’étais revenu en cours, mais dans la mémoire, le travail était loin d’être achevé. « C’était pas de sa faute… » Je répétais cette phrase qui voulait bien l’entendre, automate sans âme depuis l’accident. « Foutaise ! C’était sa faute, tout comme la tienne ! Vous étiez tous responsables. » En levant les yeux vers elle, je n’ai pas vu la haine, ni même cette foutue compassion que tout le monde semblait vouloir me donner. Elle s’est assise à côté de moi, sur les gradins du terrain de foot, et m’a laissé face à la vérité. Pour la première fois depuis des jours, quelqu’un n’allait pas mâcher ses mots. Et pour la première fois depuis des jours, j’allais laisser sortir la peine. Peine de savoir qu’elle avait raison… et que j’étais un sombre idiot. C’est comme ca que je l’ai rencontrée. Katia n’était pas de ces filles populaires qu’on remarque au premier abord. Mais elle avait tellement à offrir… à m’offrir. J’en ai bavé pour l’avoir. Autant que pour comprendre que ma vie ne rimait à rien. Alors pour elle, et pour moi, j’ai repris la cours de ma vie. Renaissance. J'avais dix-huit ans.

▬ Tu

Tu étais belle, dans cette robe blanche. Comme le jour de notre mariage. Aussi belle que le jour de notre rencontre. En venant me trouver ce jour –là sur les gradins, tu m’as sauvé la vie. Quelques temps plus tard, tu m’auras dit m’avoir tout de suite aimé. Nous n’étions que deux gosses, mais nous aimions. Plus que de raison. La douceur de ta peau, le souffle court que nos nuits, ton cœur, battant, au creux du mien. Tu m’as montré la voie de l’avenir, je t’ai rendue fière. « Mount Pleasant, Los Angeles, Paris ! Je te suivrais… » et tu m’as suivi. En an après notre emménagement, nous nous sommes mariés. Et rien n’aurais pu détruire ça. J’étais médecin, et tu écrivais nos aventures. Rien n’aurait dû détruire ça. Le bonheur parfait, les projets, l’avenir. Non, rien n’aurait… « Combien de temps ? » J’aurais voulu retenir la larme qui roulait déjà le long de ma joue. Je pouvais lire la peur dans tes yeux, et ta main, serrant la mienne. « Un an… deux, tout au plus. » Tu m’avais montré la vie, et tu allais la quitter. Je refusais l’idée. Nous avions promis, à jamais. Tu avais promis, Katia. Tu avais promis… « Promets-moi. » Le sourire sur ton visage me donnait envie de toi. « Quoi ?! » Tu t’approchais dangereusement, et tu savais, tu savais que je ne pourrais pas lutter avec ce regard. « Tu finiras mon livre. Quand je ne serais plus l… » Tes mots me glaçaient le sang, je ne voulais pas l’entendre. Jamais. « Stop… ils vont trouver quelque chose. Laisse leur juste un peu de temps. Juste… laisses leur du temps. » Tu collais ta poitrine contre mon dos, et déjà, tes bras m’enveloppaient. Ton souffle, serein, berçait mes sens, et ton parfum m’enivrait. « Promets le moi Cole… promets le moi. » Un murmure, je t’entendais. Jamais je n’aurais autant voulu revenir en arrière, à ce jour, sur les gradins, pour te dire de faire attention, que la maladie te submergerait bien trop tôt, et que j’avais mal, déjà, à l’idée de te perdre. Tu aurais ri, à coup sûr… mais tu aurais su. « Je ne connais même pas la fin… » Mes mains se posaient sur les tiennes, et mes yeux, fatigués, laissaient échapper les larmes sans même opposer une once de résistance. « Tu la sauras. » Tu semblais sûre de toi. En faisant volteface, je pouvais voir que tu n’avais pas peur. Et ce sourire, toujours, sur tes lèvres. « J’en ai pas envie. » Un baiser. Tu m’as donné un baiser, puis un autre. Tu avais su lire dans mes yeux, quelques minutes plus tôt. Et dans l’étreinte de cette nuit, je te l’ai promis.

▬ Ils

Ils affichaient encore ce sourire à la con. Un an que Katia avait déserté ma vie, et ils trouvaient encore le moyen de me sortir leur sourire condescendant. Rien à foutre. Ils ne comprennent pas. Ne comprendront jamais. Je vais… de l’avant. Je vise un poste de titulaire en trauma depuis quelques temps. J’aurais pu en accepter un à Miami, mais… je sais pas, ici c’est mon défi, à moi de le relever. Je suis un petit génie du polytraumatisme. J’ai des internes sous moi, et autant être franc, ce n’est pas qu’une façon de parler. Rien de sérieux, même si la fille de ce patient reviens assez régulièrement. J’ai des amis. J’ai une vie. « Tu as vendu la maison ? » Un an. Peter avait été mon témoin de mariage, mon allier, depuis toujours. Mais aujourd’hui, ses questions commençaient à me taper sur le système. « J’ai jamais dit que j’allais le faire. » Rien n’avait bougé. Pas un meuble, pas une photo. Ni même ses vêtements. « Bordel Taner, reviens sur terre !... elle est partie. » Je détestais lorsqu’ils essayaient de me faire la morale, même si ça partait d’une bonne intention. « Vas te faire voir Peter… je pense l’avoir déjà très bien compris tout seul. » Il n’avait pas bougé, et je ne supportais plus son regard. Mais je l’entendais, dans mon dos « Faut tourner la page Cole ! Ranger le passé, avancer. T’as pas enlevé sa brosse à dent, tu vires les gens dès qu’ils prennent un peu de place dans ta vie. Et ta promesse, hein ? T’es même pas capable de tenir ta promesse ! » M’éloignant, je savais pertinemment qu’il avait raison. Ils avaient tous raison. Je n’emmenais jamais une fille chez nous. J’achetais encore ses gâteaux dégueulasses. Jamais d’olives, sur les pizzas, puisqu’elle y était allergique. Et je refusais de finir son maudit bouquin… il restait sur son bureau, attendant qu’elle vienne le finir. Et j’en étais incapable. Incapable de suivre ses lignes comme nous le faisons, adolescents, livre à quatre mains. Incapable de faire glisser la plume sur ce papier, d’en ouvrir trop souvent les pages, incapable de prédire une fin dont je changeais la version à chaque fois. Parce que finir l’ouvrage reviendrais à en finir. D’elle, de nous, de nos souvenirs. Pire que la brosse à dents, les meubles, les photos et la maison. Pire que nos habitudes débiles. Pire que tout. Je refusais catégoriquement de l’oublier, sans même réussir à me l’avouer. Alors les excuses allaient bon train, tout comme celles que je donnais à ces filles, à ces amis, à nos familles. Un jour, j’irais de l’avant, comme elle me l’avait appris. Mais pas encore. Pas tout de suite. Laissez-moi le temps qu’elle ne m’a pas donné. Laissez-nous le temps que nous n’avons pas eu. S’il vous plait…

Bienvenue parmi nous.

Merci

On va monter un club faire pleurer dans les chaumières !
Merci beaucoup en tout cas (a).

Merci à vous
Je viens de me rendre compte (trois ans après !) qu'il y avait une autre personne pour Ian, et si jamais ca pose un problème, je peux toujours changer (j'avais hésité avec Jensen Ackles de base, donc s'il le faut, je peux changer !).

bienvenue

Merci à vous tous
Je pense avoir fini ma fiche, j'ai envoyé un mp à l'autre Ian pour savoir comment s'arranger mais j'attends encore sa réponse, donc...

Bienvenue, Cole.