Koen se réveilla dès lors que les premiers rayons du soleil filtrèrent au travers des mailles du rideau accroché aux fenêtres de sa chambre. Alors qu’elle détendait ses muscles encore tout ensommeillés, un sourire apparut sur ses fines lèvres. Elle adorait son appartement et c’était une lève-tôt ! Rien ne lui plaisait plus que d’être enlevée à la nuit par le lever du jour. Il ne restait plus sur elle qu’un léger drap de soie rose pâle mais celui-ci glissa au sol alors qu’elle dépliait ses longues jambes. Son pied frôla à ses côtés quelque chose qui ressemblait grandement à de la peau. La jeune femme se retira en toute hâte et se retrouva debout vers le haut de son lit, les bras croisés sur la poitrine et une expression de surprise peinte sur le visage. Celle-ci fut rapidement remplacée par une mine renfrognée. Nate s’était invité chez elle en plein milieu de la nuit ! Ce garçon n’avait décidément aucune gêne. Elle secoua la tête de gauche à droite en soufflant. Il était vraiment inconscient ! Qu’aurait-elle fait si elle ne s’était pas réveillée à temps et que Chris aurait eu l’idée de lui faire une petite visite matinale impromptue ? Nate ne pensait jamais à ces choses-là, il ne pensait qu’à sa petite personne et au fait qu’il avait tous les droits. Koen descendit prudemment du lit, elle n’avait pas envie de le réveiller pour le mettre dehors. Après tout, il était presque plus souvent qu’elle dans l’appartement. Ce n’était pas comme s’il faisait figure d’intrus. Une fois à terre, la jeune femme lui offrit un regard noir, qu’il ne vit pas, bien entendu.

Sur la pointe des pieds, elle s’approcha de son armoire dont elle ouvrit les portes en grand. Un miroir, collé à celle de gauche, refléta son image. D’un geste vif de la main, elle remit ses cheveux en place puis commença à farfouiller à l’intérieur dans l’intention de se créer une tenue pour la journée. Elle sortit un chemisier bleu orné de dentelles blanches, assez long pour qu’elle n’ait pas d’utilité à mettre un pantalon dessous. Elle l’enfila sans prendre le temps d’accrocher un soutien gorge dans son dos. Elle n’en avait pas besoin non plus, ses seins n’étaient pas bien lourds, ce qu’elle regrettait d’ailleurs. Koen referma les portes et se munit d’une paire de petites chaussures noires qui trainaient près de la porte qui menait au séjour de son appartement, puis elle s’engouffra dans celui-ci, encore baigné de pénombre. Elle déposa ses chaussures sur la table et entreprit d’ouvrir les volets les uns après les autres. Une fois cela fait, elle pu y voir plus clair. Koen ne travaillait pas et avait donc tout intérêt à bien remplir ses journées, ce qu’elle commençait à faire dès l’heure du réveil. Le plus souvent, elle trainait en ville et vaquait à diverses occupations jusqu’à ce qu’elle ne finisse par s’ennuyer et qu’elle décide de se rendre à l’appartement de Chris qu’il partageait avec sa petite sœur. Celui-ci n’était pas souvent présent car il travaillait beaucoup mais sa cadette se trouvait souvent dans les parages et Koen l’appréciait énormément. Penser à elle donna envie à la jeune femme de lui rendre visite pour parler de tout et de rien comme elles avaient l’habitude de le faire. Elle regrettait de n’avoir pas pensé à lui donner rendez-vous en ville, histoire d’êtres occupées à quelque chose de plus constructif, mais une petite discussion n’était jamais désagréable. Elle se rendit donc au domicile de son petit ami, et frappa à la porte. Aucune réponse ne se fit entendre. Elle recommença. Enfin, elle consentit à jeter un coup d’œil à sa montre pour se rendre compte de l’heure qu’il était. Huit heures du matin. Bon, c’était un peu tôt, en effet.

« Zoey, tu es là ? » Risqua-t-elle en criant à travers le trou de la serrure.

« Koen ! Mais entre donc. Pardon pour l’accueil, je me suis couchée tard hier soir. Tu vas bien ? Chris n’est pas la par contre, mais je pense que tu t’en doutais non ? » La jeune femme rendit son sourire à son interlocutrice et entra à l’intérieur de l’appartement. Celle-ci n’était pas encore tout à fait éveillée mais visiblement, l’arrivée de Koen lui avait fait l’effet de coup de fouet. Patientant tandis que Zoey enfilait une tenue plus présentable, ce dont elle n’avait pas besoin d’après Koen, puisque tout lui allait parfaitement, la jeune femme en profita pour regarder distraitement autour d’elle. Des assiettes sales trainaient dans l’évier, et une paire de chaussettes appartenant à Chris trônait à côté du canapé. Elle sourit. Définitivement, l’hôte de ces lieux n’avait rien contre le désordre. Une petite pointe de tendresse naquît en elle, puis s’évanouit alors que Zoey s’en revint à sa rencontre. « Je sais qu’il travaille. J’avais seulement envie de passer un peu de temps avec toi ! » Affirma la jeune femme en hochant la tête.

« Tu veux boire ou manger quelque chose ? Normalement Chris a fait du café frais il n’y a pas si longtemps, sinon j’ai du thé ou quelque chose de plus frais. Et des macarons, ou des viennoiseries. Ça ne te dérange pas que je mange ? Parce que je viens juste de me lever et j’ai faim ! » Questionna Zoey, virevoltant dans tous les sens, tant et si bien que Koen eu du mal à suivre la cadence. Attrapant un tabouret qui traînait devant les plans de travail, la jeune femme prit place sur celui-ci puis croisa les jambes. Elle n’était jamais lassée d’entendre parler de Chris, malgré ce qu’elle lui faisait subir dans le plus grand des secrets. Elle pensa à ce que sa sœur dirait si elle savait à quel point elle se jouait de son frère, celui qui avait toujours été là pour l’aider à s’épanouir quand leurs parents étaient absents. Elle ne lui adresserait probablement plus la parole, refuserait de la voir, même en peinture. Cette idée était insupportable à Koen qui pourtant, ne s’imaginait pas mettre un terme à sa relation parallèle avec Nathaniel. Ce serait trop dur, elle n’en avait pas la force. « Je vais seulement prendre du café, je te remercie. Il faut bien faire honneur aux seuls choses que Chris se donne la peine de faire en dehors du travail ! Mange tout ce que tu veux, fais comme si je n'étais pas là ! » Plaisanta-t-elle en jetant un coup d’œil lamenté aux assiettes et aux sous vêtements.

« Zoey, tu devrais le forcer à ranger ses affaires ! » Gronda la jeune femme, le sourire aux lèvres néanmoins.

« Comment ça tu n’as pas faim ? Mais … J’ai fais des macarons hier à 22h exprès pour notre prochaine journée ensemble ! Et je ne pourrais pas faire comme si tu n’étais pas là ma petite Ko, tu es à peu près la seule personne à venir me voir, alors je veux profiter de toi à chaque instants ! » Ladite Ko eut un sourire attendrit. Seuls ses proches lui donnaient ce surnom qui sonnait si familier, puisque même sa mère avait l’habitude de la nommer ainsi lorsqu’elle était enfant. Réellement attachée à Zoey, elle ne comprenait pas comment les autres ne pouvaient pas se rendre compte à quel point celle-ci était étonnante et d’agréable compagnie. Peut-être n’avaient-ils jamais fait l’effort d’apprendre à la connaître, ou n’en avaient-ils jamais eu le temps. Peut-être encore que c’était elle qui, par principe, refusait l’amitié des gens pour d’obscures raisons. Ce raisonnement était absurde mais Koen cherchait à faire défiler la moindre possibilité qui puisse expliquer cette réclusion quasi religieuse que vivait la jeune femme. Distraitement, Koen l’observa qui se préparait des œufs. Non, décidément, elle n’avait vraiment pas faim. D’ailleurs elle n’était pas très fan de pâtisseries. De plus, elle se nourrissait plus par nécessité que par plaisir.

« Euhm … C’est difficile puisque nous ne parlons pas vraiment en ce moment. Et puis, je ne fais rien de mes journées, je rangerais dès que j’aurais fini de t’accaparer ! » Souffla Zoey, en réponse à ce que Koen lui avait dit à propos du rangement. Celle-ci hocha la tête pensivement, songeant au fait que bien qu’elle fut son amie depuis près d’un an maintenant, elle n’en savait pas tant que ça au sujet de la sœur de Chris. D’ordinaire elle n’était pas très curieuse en ce qui concernait la vie privée des gens mais lorsqu’elle s’attachait à quelqu’un de façon plus ou moins officielle, elle aimait toutefois savoir avec exactitude à qui elle avait affaire. Or, Zoey était un monticule de détails superficiels dont elle ignorait l’essentiel. Elle se rendait compte qu’elle n’avait jamais posé assez de questions, ne s’était jamais assez intéressée à son passé, à leur enfance à elle et à Chris. Celui-ci lui avait bien entendu conté quelques histoires mais ces dernières étaient rapidement écourtées, comme s’il s’agissait là de choses dont il ne prenait pas énormément de plaisir à ressasser. « Pourquoi, il s’est passé quelque chose ? » S’inquiéta la brune. Ces deux là ne s’engueulaient jamais, ils étaient quasiment inséparables !

Zoey ne répondit pas immédiatement, et Koen ne fut même pas certaine qu’elle l’ait entendu, tant elle était perdue dans ses pensées, fixant l’écran de son téléphone portable avec intensité. Cela ne dura qu’une minute, et le mobile fut rangé au même endroit d’où elle l’avait extirpé au préalable. La jeune femme eut l’impression que les joues de son amie s’étaient considérablement colorées à la lecture du message qu’elle avait reçu. Une part d’elle songeait à la cuisiner à propos d’un possible petit copain qu’elle aurait pu leur cacher, à Chris et à elle, mais elle se ravisa rapidement. Que ferait-elle si après s’être confiée, Zoey lui demandait de faire de même ? Ce n’était même pas envisageable. Elle pourrait bien sur lui servir quelques salades à propos de Chris. Les jeunes filles étaient toujours avides d’entendre quelques croustillants secrets à propos de la vie privée de leur grand frère. Mais l’image de Nathaniel l’aurait hantée tout du long, et elle aurait forcément finit par craquer sous le regard inquisiteur de cette petite blonde qu’elle appréciait tant. Il n’en était pas question. « Et sinon jolie brune … T’ais-je présenté notre nouveau colocataire ? Non parce que comme tu vis à moitié ici en journée, faut bien que vous fassiez connaissance ! »

S’exclama brusquement Zoey, changeant de sujet avec subtilité. Dans ses bras, une minuscule bestiole poilue d’où s’échappaient des ronrons à profusion. « Oh ! » S’extasia Koen alors que le chaton fut posé tout près d’elle, debout sur le comptoir. Occupée à fournir des tonnes de caresses à l’animal – il y avait longtemps qu’elle n’avait pas câliné une si petite bête – la jeune femme ne porta que très peu d’attention à Zoey qui terminait de préparer son petit déjeuner tout en s’adonnant à une part des tâches ménagères. « Comment t’appelles-tu, petit monstre ? » Questionna-t-elle en regardant le chaton mais en attendant toutefois une réponse de la part de sa propriétaire. Intriguée par cette absence de réponse, Koen releva la tête juste à temps pour voir Zoey s’enfuir vers la salle de bain à toute vitesse. Inquiète, la jeune femme se leva immédiatement du tabouret, le chaton toujours dans ses bras, et s’avança prudemment vers l’entrée de la pièce dans laquelle s’était engouffrée son amie. Elle poussa légèrement la porte du pied, ne voulant pas être témoin d’une scène qu’elle aurait forcément du mal à oublier. Fermant un œil, Koen passa sa tête à l’intérieur. Zoey était assise à côté des toilettes, visiblement mal en point. La brune posa le chaton par terre, celui-ci s’élançant directement vers sa jeune maîtresse, inconscient de son état. Koen s’accroupit à ses côtés, pleine d’empathie. « Zoey, est-ce que quelque chose cloche ? » Elle imaginait déjà des tas de réponse, comme une maladie caché, ou pire, une grossesse impromptue.